Une espèce en sursis
Le grand hapalémur, Prolemur simus, est l’un des lémuriens les plus menacés de Madagascar. Il appartient à la famille des Lemuridae. Le genre Prolemur est monospécifique, c’est à dire qu’il ne comprend qu’une seule espèce.
Autrefois largement répandu à Madagascar (subfossiles retrouvés au Nord, à l’Ouest et au Centre en quantités parfois abondantes), il ne survit plus aujourd’hui que dans les forêts humides de l’Est de l’île. Les premières observations de ce lémurien datent de 1986-87 quand il a été redécouvert à Kianjavato puis dans le Parc National de Ranomafana alors qu’on pensait l’espèce déjà éteinte. Il est classé en danger critique d’extinction par l’UICN depuis 1996.
Jusqu’en 2008, on estime qu’il reste moins d’une centaine d’animaux à l’état sauvage répartis dans 5 sous-populations isolées les unes des autres et composées pour la plupart d’à peine quelques individus vivant hors des aires protégées, dans des zones souvent dégradées. Mais en novembre 2008, une nouvelle population est découverte au sud-est de Madagascar dans la commune rurale de Tsaratanana, découverte à l’origine du futur projet « Bamboo Lemur ».
En janvier 2010, la population sauvage de grand hapalémur est réévaluée à 221-331 individus (MFG, 2010). Cette même année, de nouvelles prospections permettent de repérer d’autres populations jusque-là méconnues et en février 2011, la population sauvage est à nouveau réévaluée à 411-423 individus dans 15 localités (MFG, 2011).
Aujourd’hui, la population globale est estimée à un peu plus de 1000 individus.
Le grand hapalémur vit dans les forêts humides de basses à hautes altitudes (100-1650 m) de l’Est de Madagascar. On le trouve également dans des milieux plus dégradés, des fragments de forêt de bambou ou encore dans des zones cultivées (rizières, plantations de café…).
Son alimentation est très spécialisée : elle se compose presque exclusivement de bambou dont il consomme toutes les parties. Opportuniste si nécessaire, il peut la compléter avec de la canne à sucre, des litchis, du café… Il descend au sol pour boire (l’eau est très importante pour lui), pour manger de la terre ou simplement pour se reposer.
Actif aussi bien le jour que la nuit, il vit en groupes pouvant compter plus de 60 individus selon un système social de « fusion-fission » qui n’est pas encore bien compris. Le domaine vital de l’espèce est très variable et probablement lié à l’habitat adapté disponible (surface, qualité). La reproduction est saisonnière, les naissances ont lieu en octobre et novembre. Après 150 jours de gestation (+/- 3 jours), la femelle donne naissance à un seul petit par an. Les jumeaux sont rares : seulement une observation en captivité et une en milieu naturel. Le poids moyen d’un nouveau-né est de 80 g.
Les femelles sont d’excellentes mères, très protectrices avec leurs petits qui ne seront indépendants qu’au bout d’un an (le sevrage a lieu vers 8,5-10 mois). Les femelles ont leur premier oestrus à l’âge d’un an et demi et peuvent avoir leur premier bébé vers 2 ans. Les mâles sont matures plus tard que les femelles, à l’âge de 2 ans et demi. Contrairement à la plupart des lémuriens, c’est le mâle qui est dominant chez cette espèce.
Les menaces sont nombreuses et en augmentation : destruction et fragmentation de l’habitat ayant pour conséquence l’isolement des populations, dégradation des forêts (pratique du « tavy », coupes de bois…), chasse, exploitation minière (pollution de l’eau), absence de protection de la plupart des populations.